• Olivet

    Reprenons à cette jolie petite ville du loiret, puisque j’ai effacé la préface.
    En fait mes souvenirs sont flous mais il me reste quelques faits marquants qui sentent bon : des fleurs, le loiret, les barques, la famille, le pont qu’il fallait traverser à pieds pour revenir de l’école (je ne parle pas d’y aller ni de ce qui s’y passait…cette phase m’est inconnue. Seul le retour m’incombait : toujours cette envie d’être coconnée, cette recherche de chaleur, de foyer).
    Je me souviens d’un après midi où, penchées au milieu du pont, nous cherchions fraternellement une éventuelle trace du cartable que notre sœur V... avait jeté dans l’eau…comme çà, pour voir s’il flottait ! le fleuve coulait, magnifique et vert…le cartable aussi coulait. Nous étions toutes excitées et rigolotes, sauf Ch.... qui s’est toujours prise au sérieux. Elle a toujours été différente. Je ne l’ai jamais comprise. Je pense d’ailleurs qu’il est impossible de comprendre l’autre : il faut simplement le vivre. Ma sœur Ch....., je n’ai même pas su la vivre : elle est un gros point noir dans mon existence..une bavure..une erreur d’aiguillage. Aujourd’hui encore elle reste un mystère dans mes pensées.
    En parlant de point noir, voici que la famille Lenoir remonte à la surface. Cette grosse bonne femme, souvent sur le pas de sa porte, juste face à la nôtre. La seule image que j’ai gardé d’elle est son énormité, son allure campagnarde et son chien. Elle ne me gênait pas : elle était là, c’est tout.
    Nous habitions une petite maison toute en longueur. A l’avant : une cour ouverte sur la rue. Peut être un étage ? là encore une seule partie de la maison est restée bien ancrée dans ma tête : le pied de la table en bois massif rongé par le lapin en liberté et ce coq dont papa avait coupé la tête et qui courait encore dans la salle à manger…il était nerveux ce coq !…nous avions un poulailler dans la cuisine : je crois que nous les avons toutes mangées les poules avec leurs œufs.
    Le lapin, je l’aimais bien. Il avait donné à nos meubles cet air penché qui ressemblait tant à notre vie..rien de droit : tout au nom de la liberté. Aucune structure et beaucoup d’instinct : il paraît que notre père avait une âme de bohème. Il a été beaucoup critiqué. Moi, je l’admirais. Son côté aventurier et casse cou, bien sûr, ce n’est pas le reflet de la sécurité que l’on peut donner à une famille…mais c’est bien plus amusant ! MERCI Papa, j’ai bien rigolé.
    Apparemment nous n’avions pas les moyens. On m’a rapporté qu’à cette époque papa vendait de la tôle ondulée sur les marchés d’Orléans. Maman était professeur de français, latin, grec et philosophie. C’était une grosse tête ma mère ! issue d’une famille de bourgeois enracinés, elle avait eu beaucoup de problèmes lors de son mariage avec papa. Lui était pourtant issu d’une famille de notables à Castelnaudary dans l’aude mais ces propriétaires terriens étaient des ploucs aux yeux crottés de la bourgeoisie maternelle. Alors pauvre maman, aucune aide de ces richards ringards, aucun sentiment non plus. Mais elle l’aimait son fiancé et c’était là sa richesse. Les trésors de l’âme rapportent bien plus que tout l’or du monde. Après tout pourquoi vit on ? pour être heureux ou pour posséder ? à chacun sa philosophie..la mienne est faite.
    Olivet c’était également ces barrières basses et fraichement peintes de blanc qui gardaient sévèrement les maisons de plein pied habitées par les américains restés en France suite à la seconde guerre mondiale. Je revois ces americains, vêtus différemment et si beaux mecs mais ne me souviens pas qu’il y ait eu une caserne. Elles étaient belles leurs maisons : accueillantes et sympathiques.
    La meilleure copine de ma sœur V... s’appelait S... B.... Je me souviens de jeux extraordinaires : une voiture toute en sable, décorée de rouge et d’allure moderne dans laquelle je restais des heures entières sans même penser à rentrer à la maison. Pourtant il le fallait bien. Alors tous les soirs, la rue n’étant pas éclairée et la nuit noire de campagne nous envahissant, S... nous raccompagnait. Mais elle avait peur de rentrer seule, alors V.... la raccompagnait et ainsi de suite jusqu’à ce qu’un éclair de courage soit bénéfique à l’une ou à l’autre.
    Ces quelques mètres sont tout un épisode de notre passage à Olivet.
    Les week end se passaient sur les bords du loiret. Papa peignait en artiste les voiliers qui, endormis ou actifs, faisaient eux aussi leur chemin dans ce décor de verdure étincelante. Nous pique niquions : le suprême du suprême était le poulet au cresson que maman avait bichonné. A cette époque, manger du poulet était un luxe. En semaine c’était bouillons, pates, légumes et jamais de viande.
    Papa faisait partie de ces gens naturellement doués. Il avait le don de la musique : sans jamais avoir appris, il retraduisait avec une exactitude surréaliste tout morceau entendu à la radio, que ce soit du classique, du jazz ou autre..et ceci sur n’importe quel instrument ! Pour la peinture, c’était pareil. Il a fait des chefs d’œuvre qu’il n’a jamais voulu vendre malgré les propositions qui s’offraient à lui et pourtant l’argent manquait. C’était un artiste pour le plaisir et toujours au nom de la liberté.

    ...........3ème épisode..........à suivre........dans la série Biographie.......................

    « DescartesMaisons-Alfort »

  • Commentaires

    1
    Vendredi 11 Juin 2010 à 12:00
    Encore une fois, c'est amusant. Mon père jouait de l'accordéon sans jamais avoir appris la musique ! Il faisait des bals, c'était son grand plaisir ! Bisous; Coryphee
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