• Les Pays bas

    Je n’eus aucune difficulté à trouver quelqu’un pour m’accompagner en Hollande. Il trainait constamment une odeur de voyages au quartier latin. C’était les années après 68 et on ne se prenait pas la tête ! Baba cool et love and peace……. De plus, Amsterdam était la plaque tournante pour le haschich. Cette route était bien connue. 5 minutes d’auto stop et nous étions déjà installés dans une voiture qui se rendait direct aux Pays bas. Nous avons passé la frontière belge puis la fontière hollandaise vers 1h du matin. C’est à peine si nous nous sommes aperçus qu’il y avait une frontière ! les postes étaient désertiques et nous sommes passés les doigts dans le nez. J’étais contente de découvrir les Pays bas. Notre chauffeur nous a déposés à la place des dam qui grouillait de jeunes et moins jeunes. Nous avons passé la nuit là, bercés par les guitaristes. Chacun avait son duvet. Cela ne choquait pas, c’était usuel à Amsterdam. Le lendemain, après un petit déjeuner pris dans un bar, je me rendis chez le gynécologue auprès duquel j’avais été recommandée. J’y suis allée à pieds, me faufilant parmi les innombrables vélos noirs qui jonchent les pavés là bas. J’ai bien fait 6 km avant d’arriver vers la sortie de la ville, dans un quartier résidentiel. Toutes les maisons étaient magnifiques. J’ai traversé des mètres et des mètres de prairies bien vertes et fleuries. Il y a beaucoup d’espace dans ce pays. Tout est propre. Le docteur m’attendait. Il m’explique comment l’avortement va se passer dans son cabinet et me donne l’adresse d’une bonne famille chez qui je peux trouver un emploi de servante, afin de récolter la somme pour payer l’intervention. Je me rendis à cette fameuse adresse et trouvais porte close. J’y suis retournée plusieurs fois et n’ai toujours trouvé personne. Je n’ai pas insisté car plus j’avançais dans le temps et plus je voulais le garder cet enfant ! J’ai laissé tomber l’affaire et suis retournée place des dam avec la ferme intention de rester quelques jours pour visiter. La personne qui m’avait accompagnée a été déçue de ma décision. Nous nous sommes fâchés et j’ai continué seule, soulagée dans mon âme. J’allais assumer ma grossesse et qu’importe le qu’en dira t on. Je m’étais toujours débrouillée jusque là, je devais y arriver. Je me sentais presqu’heureuse et puis je savais qu’à ma majorité, je toucherais ma part d’assurance vie. Donc, c’était jouable. Je le voulais mon bébé, fallait simplement en prendre conscience et ne pas se laisser embarquer dans ces idées réac de l’époque. A Amsterdam, on pouvait vivre sans argent. Sur les canaux, il y avait des péniches aménagées en bar style boites de nuit. On pouvait y passer la nuit sans consommer. Ces bars étaient bondés de jeunes et tout le monde se cotoyait, sans aucune arrière pensée. Le seul hic est qu’il flottait un halo de fumée de hasch, mais après tout…….ça aidait à se reposer. J’aimais beaucoup remonter la petite rue depuis la place des dam jusqu’aux canaux. C’était tout en couleurs et les baraques de frites sentaient bon. J’ai vu les dames en vitrines ! Ca : c’était moins chouette. Elles faisaient étalage, il ne leur manquait que le code barre. C’était de la viande sans cellophane puisqu’à l’époque l’usage du préservatif n’était pas monnaie courante. Et puis j’ai vu le port d’Amsterdam avec ses marins qui chantent et qui boivent et qui pissent, comme l’a si bien décrit Jacques Brel. J’étais contente de mon petit voyage mais il a fallu me résigner à rentrer en France car je n’avais plus un sou en poche. Je me suis mise à l’entrée de l’autoroute, le pouce en l’air. J’ai très vite trouvé une voiture mais qui n’allait pas très loin, cette fois ci. La personne me dépose à une sortie et je me repositionne pour continuer ma route. Seulement voilà ! l’auto stop sur l’autoroute est interdit et Oh surprise……c’est le panier à salade qui s’arrête et me fait monter à bord ! Zut……je n’avais pas pensé à ça. Direction le commissariat…….enquête (ça me rappelait vaguement mon séjour outre manche (voir épisodes 37 / 38 et 39 dans la catégorie « biographie »)). J’étais en état de vagabondage aux yeux de la loi car j’avais moins de 10 francs sur moi. Qui dit vagabondage en Hollande, dit expulsion du pays. Quand je pense à tout ce qui se passe actuellement en France avec les immigrés et quand je vois qu’ils n’hésitent pas à manifester…..entre autres………pour leur condition ! ils feraient bien d’aller voir dans nos pays voisins. Ils comprendraient la chance qu’ils ont d’être parmi nous. Le fourgon m’emmena à la prison d’ Utrecht. Cette belle bâtisse moyennageuse m’aurait plue en tant que touriste mais là : j’ai pu apprécier le cachot. Une paillasse en bois, une lucarne très haute avec des barreaux, un tabouret. Le garde qui me passe ma gamelle par l’occulus de la lourde porte, la lune au travers des barreaux. Le matin : réveil à 6h pour aller faire la toilette dans cette espèce de mangeoire à cochons. Pas d’eau chaude, pas d’intimité non plus. Toutes les filles à poil et en rang d’oignon. Pas de chauffage non plus. Au bout de 24h, les gardiens sachant que je n’avait rien fait de mal et que j’étais enceinte, m’invitèrent à jouer aux cartes avec eux. Là, au moins, j’étais au chaud et mangeais des petits gâteaux. Je suis restée 3 jours dans cette prison puis le fourgon est venu me rechercher pour m’emmener à la frontière belge où on m’a à nouveau internée dans une pièce sans fenêtre cette fois et aux murs capitonnés pour que je ne me tapes pas la tête contre les parois. A midi, j’ai eu droit à une assiette à soupe de yaourt à la fraise car j’étais enceinte. En fin de journée, on m’a inscrite dans un énorme livre, en rouge puis on a mis un tampon sur ma carte d’identité « en rouge toujours : interdit de séjour aux pays bas pour dix ans ». J’ai été libérée vers 22h. On m’a remis 10 francs pour que je sois « légale » et………démmmerdes toi pour rentrer à Paris ! Il faisait nuit noire. J’ai marché, marché, marché jusqu’au petit matin où une voiture s’est arrêtée et m’a emmenée jusqu’à la maison.

     

    ...........45ème épisode..........à suivre........dans la série Biographie.......................     

    « AristoteSystème D »

  • Commentaires

    1
    Dimanche 27 Juin 2010 à 12:00
    Effectivement !! je n'avais pas suivi ta bio à cette époque là !! quelle galère...ben dis-donc, tu as été marquée au fer rouge pour ta visite dans le pays toi..! et je n'aurais jamais pensé, qu'étant mineure, ils t'auraient gardée en prison..ils pouvaient contacter le consulat et demander à joindre un représentant légal, au lieu de te foutre en taule c'aurait été la moindre des choses, car en plus, tu étais enceinte, avec ou sans la bénédiction de tes parents ou tuteurs légaux.. Heureusement que tu as pu rentrer au bercail...bisous Arielle
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